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Un polar haletant pour les 4e / 3e et le lycée
Vue sur crime, de Sarah Cohen-Scali
Flammarion, collection Tribal, 2000, 170 p., 7€.
samedi 28 avril 2007
Un formidable polar au suspense haletant, au style acéré comme un couteau de boucher. Deux personnages à la croisée des chemins, le jeune taulard et le boucher homo aux perruques bouclées et aux jeans trop moulants, qui vont se heurter comme des ours mal léchés. Un livre à dévorer en fin de collège, en lycée et en lycée professionnel.
Résumé
Pascal Sirel sort de prison. Il a 19 ans. À l’âge de 17 ans, il avait la mauvaise habitude de cambrioler les appartements cossus du 16e arrondissement de Paris, plus pour le frisson que pour voler. Un jour, il avait eu plus de frisson que de coutume, en tombant sur le corps décapité d’une jeune femme. Le benêt avait appelé la police avant de s’évanouir dans une mare de sang. Le voici donc mis à l’épreuve, et bien pris en charge, le petit chéri, puisqu’on lui a trouvé une piaule au Palais-Royal, et un job comme boucher au Monop d’a côté. Il y a pire pour un repris de justice, non ? C’est vrai qu’à force de mater les appartements d’en face, ses obsessions de crimes sanglants lui feraient voir des criminels derrière les peintres les plus inoffensifs. Le chef boucher est un peu spécial : « Mon nouveau chef est homosexuel. Il ne manquait plus que ça. Je n’ai absolument rien contre les homos, loin de là. Ils ont droit à tous les droits. Seulement voyez, en tant que bon ours qui se respecte, j’aurais plutôt tendance à rechercher la femelle en période de rut. Autrement dit, j’espère qu’il me fichera la paix » (p. 27). Oh non, Pascal, il ne te fichera pas la paix ! Tu n’es pas au bout de tes peines avec « ce petit bonhomme aux accents de tantouze » (p. 94) qui te réveillera en pleine nuit parce que son mec l’a plaqué, brisant net son désir d’adoption. Tu vas voler à son secours, risquant de te faire pincer par ton éducateur chargé de vérifier que tu respectes le couvre-feu. Il te racontera sa vie, tu vas te trouver un point commun avec lui : le rejet par la famille qui guette autant l’homo que le taulard. Et il ne te lâchera pas la grappe tout au long de ce formidable polar au suspense haletant dont je ne vous révèlerai pas les rebondissements ni la chute, bien entendu !
Mon avis
Voici un livre à dévorer en fin de collège, en lycée et en lycée professionnel. Tout est bon dans le Cohen-Scali, rien ne cloche ! Un style acéré comme un couteau de boucher, même lorsqu’il s’agit de relater le rite aliénant du travail de caissière. Plusieurs morceaux de bravoure. Au lieu de s’extasier sur la possession d’un téléphone portable, comme d’autres livres de notre liste, l’auteur en use avec brio pour les besoins de l’enquête, avec des doubles scènes où il se passe une chose au bout du fil, et tout autre chose dans l’appartement d’en face. L’auteur excelle dans ces dédoublements, que ce soit dans une course poursuite ou au Monoprix, de part et d’autre d’une vitre, ou à la fin, mais à vous de découvrir… Et tout cela colle parfaitement avec la folie qui s’empare de ce jeune taulard, ce gosse effrayé par tout ce qu’il voit autour de lui. L’identification fonctionnera à merveille, et la réflexion sur l’homophobie sera entraînée dans le maelström des questionnements du jeune homme. Bravo à Sarah Cohen-Scali pour avoir inventé un personnage aussi riche, aussi vrai, et pour nous avoir épargné les lourdes leçons de morale qu’on trouve dans tant de livres, pour les remplacer par une tempête dans un crâne sincère, qui se poursuivra dans le crâne des jeunes lecteurs… et des adultes, car ce roman ne déparera pas les meilleures bibliothèques…
– Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».
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