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Du sexe et du handicap, pour les lycées.

Équinoxe, d’Arnauld Pontier

Actes Sud, 2006, 121 p., 16 €.

lundi 30 avril 2007

Un livre au sujet rarement abordé, la sexualité, ou plutôt la négation de la sexualité d’une adolescente handicapée. Intéressant pour les lycéens suffisamment mûrs pour s’intéresser à ces questions, et bien sûr pour les adolescents handicapés, à qui ce livre permettra peut-être d’entamer un dialogue utile avec leur entourage.

Résumé

Carine a perdu l’usage de ses jambes et de la parole après un accident de voiture qui a coûté la vie à son père. La communication est difficile avec sa mère, médecin, dont elle se demande si elle ne présente pas le handicap de sa fille de cette façon : « ma fille est D 11-D 12 », pour montrer à ses patients qu’elle peut les comprendre. « Je suis devenue une corvée » (p. 27). Au-delà de son handicap, ce qui préoccupe Carine, c’est la sexualité : « J’étais née pour la vie, pour sentir la main d’un homme courber mes reins » (p. 14). Elle s’imagine livrée aux désirs des patients de sa mère, « nue, une barre chocolatée enfoncée dans le sexe » (p. 18). Elle montre ses seins à un jeune voisin de 16 ou 20 ans - ou n’est-ce pas plutôt un fantasme ? — qui lui permettra de réaliser ses désirs les plus crus, en dépit de ses « deux jambes qui ne peuvent même pas s’écarter » (p. 34). Le jeune homme la rejoint, telle un puzzle qu’elle construirait avec des éléments que ses yeux ont pu repérer ici ou là, par exemple « sa poitrine aussi musculeuse que celle des hommes qui se pavanent [...] en couverture des magazines gay » (p. 56). Ce jeune homme est tatoueur, et elle décide de se faire tatouer un dragon. Elle fait entrer son aide-soignante Gabrielle dans le fantasme en la manipulant. C’est cette dernière qui lui apprend l’existence de trois types de « valides qui s’intéressent à nous » : « les dévotees, les wanabees et les pretenders » (p. 73). Carine présente ensuite son petit ami à sa mère, puis s’imagine des aventures vengeresses.

Mon avis

Voici un livre au sujet rarement abordé, la sexualité, ou plutôt la négation de la sexualité d’une jeune handicapée. Le vocabulaire et les faits évoqués, notamment les fantasmes sexuels, sont très crus, ce qui nous incitera à la prudence avant de conseiller ce livre à des adolescents choisis, capables de le comprendre sans être choqués. En dépit de quelques passages au style un peu m’as-tu-lu, et surtout des scènes finales aux personnages stéréotypés et datés (une concierge pétainiste, un bistrotier nostalgique de l’Indochine), ce court roman nous semble intéressant pour quelques lycéens suffisamment mûrs pour s’intéresser à ces questions, et bien sûr nous pensons avant tous aux adolescents handicapés qui vivent ce genre de situation. L’un des intérêts de ce livre sera sans doute de permettre d’entamer un dialogue utile avec leur entourage.

 Sur la question du handicap et de la sexualité, voir aussi Simple, de Marie-Aude Murail, Le Transfo, de Sylvie Deshors, Pensée assise, de Mathieu Robin, et Karim & Julien, de votre serviteur. J’oubliais En roue libre, de Frédérique Niobey, qui inverse la situation d’Equinoxe (mère handicapée), mais la sexualité y est à peine abordée.

Lionel Labosse


Voir en ligne : Site d’Arnauld Pontier


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