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Hélène Carrère d’Encausse et l’« écriture inclusive ».

dimanche 6 août 2023

Pour rendre hommage à Hélène Carrère d’Encausse décédée le 5 août 2023 à l’âge de 94 ans, je reprends la magistrale « Lettre ouverte sur l’écriture inclusive » qu’elle a cosignée avec Marc Lambron le 7 mai 2021, sur le site de l’Académie française.

Lettre ouverte sur l’écriture inclusive

Au moment où la lutte contre les discriminations sexistes implique des combats portant notamment sur les violences conjugales, les disparités salariales et les phénomènes de harcèlement, l’écriture inclusive, si elle semble participer de ce mouvement, est non seulement contre-productive pour cette cause même, mais nuisible à la pratique et à l’intelligibilité de la langue française.

Une langue procède d’une combinaison séculaire de l’histoire et de la pratique, ce que Lévi-Strauss et Dumézil définissaient comme « un équilibre subtil né de l’usage ». En prônant une réforme immédiate et totalisante de la graphie, les promoteurs de l’écriture inclusive violentent les rythmes d’évolution du langage selon une injonction brutale, arbitraire et non concertée, qui méconnaît l’écologie du verbe.

Un corset doctrinal prétend ainsi régir la pratique des scripteurs, mutilant les respirations et la logique de la langue. En posant qu’il existerait par principe une corrélation entre le genre des vocables et le sexe de leur référent, les propagateurs de l’écriture inclusive méconnaissent naïvement les règles du genre grammatical, où masculin et féminin ne correspondent pas systématiquement à des catégories sexuées. Ainsi dit-on « une échelle » mais « un escabeau », et dans l’armée « une sentinelle, une ordonnance » ou « une estafette », un marqueur féminin désignant ici des fonctions historiquement masculines.

L’écriture inclusive offusque la démocratie du langage. Outre que la correspondance avec l’oralité est impraticable, elle a pour effet d’installer une langue seconde dont la complexité pénalise les personnes affectées d’un handicap cognitif, notamment la dyslexie, la dysphasie ou l’apraxie. Une apparente pétition de justice a pour effet concret d’aggraver des inégalités.

L’écriture inclusive trouble les pratiques d’apprentissage et de transmission de la langue française, déjà complexes, en ouvrant un champ d’incertitude qui crispe le débat sur des incantations graphiques. En focalisant l’attention sur l’obsession du genre, elle restreint le rapport à la langue en inhibant une expression plus ample de la pensée. Bien loin de susciter l’adhésion d’une majorité de contemporains, elle apparaît comme le domaine réservé d’une élite, inconsciente des difficultés rencontrées au quotidien par les pédagogues et les usagers du système scolaire.

L’écriture inclusive installe ainsi un débat de l’entre-soi cantonné à un périmètre limité, au préjudice des étrangers désireux d’apprendre notre langue telle qu’elle leur est souvent transmise par de grands textes patrimoniaux. Dans un monde où la francophonie, principalement sur le continent africain, est appelée à un développement exponentiel, ce mode d’écriture dissuasif est susceptible de renforcer l’anglais comme langue véhiculaire.

Hélène CARRÈRE d’ENCAUSSE, Secrétaire perpétuel de l’Académie française
Marc LAMBRON, Directeur en exercice de l’Académie française

Je n’ai qu’un argument à ajouter à cette Lettre ouverte, celui de l’exclusion, en plus des « personnes affectées d’un handicap cognitif » (que j’ai constatée maintes fois dans mes classes) des aveugles et malvoyants :
Dans mon Journal de vaxinofolie coronavirale (9), septembre - octobre 2021 à la date du 27 octobre, j’avais recueilli l’avis, sur la question, d’une amie aveugle, Anne, excellente relectrice au demeurant :

« L’écriture dite "inclusive" n’est conforme ni à la lettre ni à l’esprit du Français qui a toujours utilisé le masculin pour désigner les cas où le genre n’est, ou bien pas indiqué, ou bien "inclusif" des deux précisément. Outre la dérive idéologique que ce système représente, cette forme d’écriture est une catastrophe pour les utilisateurs de synthèse vocale pour lesquels toutes ces insertions de points médians et autres parenthèses rendent la lecture incompréhensible. Donc à proscrire absolument pour les personnes que nous sommes ! »

Quant au dernier argument : « Dans un monde où la francophonie, principalement sur le continent africain, est appelée à un développement exponentiel, ce mode d’écriture dissuasif est susceptible de renforcer l’anglais comme langue véhiculaire », les événements actuels en Afrique ne font qu’illustrer l’avertissement des académiciens. Après la Syrie qui a remplacé le français par le russe en 2014, l’Algérie, le Mali vient d’abandonner le français comme langue officielle. Encore 4 ans avec à l’Élysée Emmacruel Nécron et le professeur de français qui a commis sur lui un détournement de mineur, et la francophonie ne sera plus qu’un puits de nostalgie.

Lionel Labosse

Je suis très fier car sur ma proposition, mon syndicat Action & Démocratie a fait ce communiqué qui a été envoyé à tous les enseignants de France. C’est peut-être le seul message qu’ils recevront en cette période de calme plat, et les autres syndicats, tous wokistes, vont être fous de rage !

 En septembre 2024, je publie un article Si l’on demandait aux étudiants leur avis sur l’« écriture inclusive » ?.

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