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Tout, tout, vous saurez tout sur le zizi ! Pour lycéens.

Dirtybiology. La grande aventure du Sexe, de Léo & Colas Grasset

Delcourt, 2017, 184 p., 19,5 €.

mercredi 17 janvier 2018

Léo Grasset est un professeur de biologie spécialisé dans la vulgarisation scientifique, créateur d’une chaîne Youtube et du site « Dirtybiology ». Il s’est associé avec son frère Colas Grasset pour créer cet album consacré comme son titre l’indique à la sexualité dans le règne animal, mettant l’accent sur des aspects anecdotiques les plus propres à attirer l’attention avertie des ados les plus « dirty » ! La notion de « sexe » est prise dans son acception la plus large et scientifique possible, ce qui tranche avec les manuels traditionnels d’éducation à la sexualité. Sur un ton djeune décomplexé, mais à la fois scientifique et précis, les auteurs donnent un panorama de la diversité des formes de la sexualité, ce qui peut contribuer à une éducation à une sexualité altersexuelle éloignée de « papa pique et maman coud » ! Dans la lignée du Manuel universel d’éducation sexuelle à l’usage de toutes les espèces d’Olivia Judson (Points Seuil, 2006).

Résumé

Un narrateur extraterrestre, mais à la voix off « suave et profonde » « de beau gosse » (si vous regardez les vidéos, vous en serez facilement convaincu !), prend la parole. On reconnaît la figure du graphiateur, qui recoupe ici la figure du youtubeur narcissique, avec le grain de poivre de la rivalité entre les deux frères auteurs. Ainsi, p. 106, le premier graphiateur, lui-même au graphisme assez sommaire, cède-t-il la place à « Léo », au graphisme infantile (un rond et cinq traits), avec cette légende : « Je ne vous cache pas que j’ai les boules d’être dessiné par le frère le moins doué ». Bref, tout cela est fort potache, mais ce graphiateur sait reprendre son sérieux, et nous explique d’abord que « le sexe » n’est apparu ni avec les organes génitaux, ni avec « le concept de mâle et de femelle », mais avec « la mise en commun de deux individus qui en produit un troisième différent ». Puis il explique que ce qui est évident pour les humains dans la représentation qu’ils se font du « sexe » (organes sexuels, type sexuel, accouplement, échange de gènes), peut être fort différent dans l’ensemble du règne animal. S’ensuit un aperçu des particularités sexuelles d’espèces variées, qui donnent lieu à des croquis et commentaires humoristiques autant que scientifiques. On relèvera quelques exemples, laissant au lecteur le soin d’approfondir. Mais d’abord, vue l’étendue des particularités, la notion de « femelle » et de « mâle » mérite d’être précisée, en l’absence de reproduction vivipare : « Lorsque chez d’autres espèces les gamètes sont de taille différente, on définit le mâle comme celui qui produit le petit gamète et la femelle comme celle qui produit le grand gamète. » (p. 46).
L’escargot illustre l’hermaphrodisme, car il porte les organes sexuels mâle et femelle, et peut se fertiliser lui-même.

Dirtybiology, Léo & Colas Grasset. L’escargot.
© Delcourt

Le poisson-clown vit en symbiose avec une anémone de mer. Une colonie est composée d’une grosse femelle et de plusieurs mâles, dont un mâle reproducteur, qui lorsque la femelle meurt, change de sexe et prend son rôle.
Les gobies, plus précisément le Gobiodon okinawae, « passent alternativement de mâle à femelle plusieurs fois au cours de leur vie, en fonction des besoins du moment » (p. 79). C’est peut-être le modèle qui inspira à Ursula Le Guin l’idée du « kemma » dans La Main gauche de la nuit.

Dirtybiology, Léo & Colas Grasset. Le Gobiodon.
© Delcourt

La crépidule fait l’objet d’une page amusante sur le thème du gangbang, puisque l’individu qui se transforme en « femelle » attire sur lui les autres individus qui se font « mâles », et copulent jusqu’à mort de la première femelle, remplacée alors par le premier mâle de la mêlée ! S’ensuivent des pages assez pointues sur l’évolution permise par la reproduction sexuée, les méthodes non sexuées (clonage), etc.
L’attention du lecteur est alors attirée sur quelques exemples très « dirty » de « ratages » de l’instinct sexuel, comme lorsque, trompés par leurs phéromones, les lézards sont attirés par « un cadavre chaud et odorant » : c’est la « nécrophilie » (p. 118). Tous les mots de la sexualité adulte y passent, et cela effraiera bien sûr les censeurs, qui préfèreront sans doute que l’éducation sexuelle se face en douce sur l’Internet porno plutôt que dans des BD au ton certes aguicheur, mais instructives. Nous vous laissons découvrir comment le mot glory hole se trouve appliqué à la symbiose entre la guêpe et le figuier (p. 127)…
On s’intéresse ensuite aux comportements sexuels, la polygynie majoritaire, la polyandrie chez les primates callitrichidae, qui ont aussi la particularité que le père s’occupe des nourrissons ; la monogamie, pratiquée par « seulement 3 % des mammifères » (p. 136) et 90 % des oiseaux, mais seulement pour une saison dans la plupart des cas, et pour toute la vie chez quelques espèces (manchot, cygne…). La polygynie chez les lions entraîne un comportement infanticide, rendu dans une langue savoureuse : « Du coup, pour avoir une chance de les bouillave… il tue leurs enfants » (p. 149). Encore un mot inconnu, l’apomixie, système de reproduction non sexuée de cyprès d’Afrique du Nord.
Un livre assez étonnant donc, plutôt pour des lycéens, vu à la fois le ton et le niveau scientifique.

Lionel Labosse


Voir en ligne : Dirtybiology


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