Accueil > National-covidisme > Le Spectacle de Demain
Des spectacles « dans ma maison » ?
Le Spectacle de Demain
Discussion proposée par le collectif Les Bâtisseurs d’Espoir
samedi 26 mars 2022, par
En appartement, maison ou jardin, le spectacle chez l’habitant n’est pas nouveau, mais l’épisode covidiste qui dure depuis mars 2020 lui donne un coup de jeune & de projecteur, et si la tyrannie sanitaire se poursuit, peut-être deviendra-t-il un point essentiel de la résistance. De l’activité « non-essentielle » interdite sous prétexte de confinement aux « jauges », au « passe sanitaire » puis « vaccinal », sans parler du port du masque obligatoire dans un métier où le masque avait une autre fonction, le spectacle vivant s’est trouvé bouleversé comme il ne l’a jamais été, même sous l’Occupation. À partir de ce constat, le collectif Les Bâtisseurs d’Espoir a organisé le 9 mars 2022 une discussion présentée comme suit : « Le Spectacle de Demain : Le pass sanitaire exigé pour accéder aux spectacles nous amène à nous interroger sur le lien entre artistes & spectateurs. Le spectacle en appartement est-il une solution d’avenir ? » Les Bâtisseurs d’Espoir est un collectif citoyen apartisan dont le but est de « construire le monde de demain », sans forcément « changer le monde d’aujourd’hui » mais en « vivant nos valeurs ».
Cinq artistes (comédiens, chanteurs, metteurs en scène), trois hôtes et des amateurs de spectacle (dont votre serviteur) étaient invités à partager leur expérience et leur avis sur l’avenir du spectacle à domicile. L’idée de cette réunion m’avait été inspirée après avoir assisté récemment à trois spectacles de ce type. Ayant à enseigner cette année le thème de BTS « Dans ma maison » au programme de l’enseignement de « Culture générale et expression », je trouvais que les parascolaires que j’ai consultés viraient parfois à l’apologie du confinement, sur le modèle « Qu’est-ce qu’on s’est amusés pendant l’Occupation » ! J’ai donc souhaité approfondir ce thème sur lequel je n’ai pas vu passer beaucoup d’articles récents, avec l’éventualité de publier sous forme d’article un résumé de ce compte rendu personnel (qui va au-delà des échanges de cette soirée). Ayant évoqué cette idée auprès d’Hélène, celle-ci a immédiatement accepté, et organisé la soirée, ce dont nous pouvons la remercier vu son investissement rare autant que généreux. Les artistes présents étaient Mathilde, comédienne, et son mari Moïse, metteur en scène ; Marie-Line Weber, chanteuse, Laurent et Georges, tous deux acteurs & chanteurs (certains prénoms ont été modifiés). Les « hôtes » présents à cette réunion étaient justement nos hôtes pour la réunion, Hélène & Philippe, fondateurs du collectif Les Bâtisseurs d’Espoir, et Anne-Marie. Les simples spectateurs étaient Nicolas, Grégory et votre serviteur. Trois personnes étaient excusées.
1. Aux origines de cette pratique de lieux de spectacle alternatifs.
1.1. Avant le covidisme.
Un certain nombre d’associations locales ou culturelles proposent depuis des années du théâtre ou du spectacle en appartement. Par exemple, « Coulisses » (« Le blog des producteurs du spectacle vivant ») nous apprend ceci :
« Né dans les années 50 outre-Atlantique, le théâtre d’appartement (ou à domicile) part du principe de déplacer la scène à la rencontre du public. Ce n’est plus le spectateur qui vient au théâtre mais le théâtre qui vient à lui. Phénomène au départ plutôt rural et provincial (pour pallier la rareté de lieux de diffusion), le théâtre d’appartement suscite de plus en plus d’intérêt dans les grandes villes. Cette forme poursuit différents objectifs : partir à la rencontre des publics, sortir le spectateur de l’anonymat, désacraliser l’acte théâtral, explorer différents jeux d’acteurs… »
Un article publié par l’Express en 2015 note une croissance du spectacle à domicile. J’en extrais ce paragraphe qui résonne étrangement aujourd’hui :
« « J’adore le théâtre, mais je n’arrive jamais à y traîner mes amis qui préfèrent le cinéma. En faisant venir des comédiens à la maison, ils ne pourront plus y couper et je compte bien leur transmettre le virus », s’amuse-t-elle en servant un verre de vin rouge à l’un des comédiens. Une chose est sûre, ce virus, Claire P. en est atteinte. Sérieusement, même. Cette amatrice veut tout comprendre : comment écrit-on un texte ? À quoi ressemble la vie d’une compagnie sur la route ? Quelles sont les difficultés à jouer à domicile ? « Tant que je les ai sous la main, j’en profite », glisse-t-elle entre deux questions. »
D’après la comédienne Mathilde, le théâtre en appartement en France aurait son origine dans les années 1960 avec la création des Maisons de la Culture par André Malraux, ministre des Affaires culturelles et de la décentralisation [1]. Il s’agissait de démocratiser le théâtre en l’amenant chez les gens qui ne fréquentaient pas d’eux-mêmes les salles de spectacle, dans les cités, les HLM, avec un cahier des charges et des subventions. Pierre Ascaride (frère de la comédienne Ariane) aurait inventé le « théâtre à domicile » en 1978, avant d’être nommé directeur du Théâtre 71 de Malakoff en 1984. Pour ma part, j’avais intégré à la fin des années 1990 un atelier au sein du théâtre de Tremblay-en-France, mairie communiste, et nous étions censés jouer dans des appartements. Malheureusement j’ai abandonné le projet avant terme, mais j’avais écrit des sketches qui dorment dans mes tiroirs.
Anne-Marie témoigne de son expérience. Elle avait accueilli chez elle jadis (appartement parisien de 40 m2) trois spectacles bien avant le covid, à mi-chemin entre amateur et professionnel, notamment un spectacle en 2008 (sans sono). Elle a elle-même toujours eu une pratique personnelle du théâtre, et a souvent pu rencontrer des comédiens à des avant-premières. Avec ses enfants, elle avait aussi déjà eu l’expérience de spectacles de comédiens-clowns pour à peu près 20 enfants.
Il existe aussi des productions privées prestigieuses organisées par des mécènes. Georges donne l’exemple d’un spectacle lyrique auquel il a eu l’occasion de prendre part pour un remplacement de dernière minute, pour la Fondation de France, devant un public réduit autant que choisi à 350 € la place…
1.2. Depuis le covidisme.
Hélène et Philippe faisaient partie d’un réseau d’hôtes dont ils avaient fait connaissance dans leur voisinage depuis plusieurs années. Ils s’invitaient les uns chez les autres, et c’était surtout pour eux, grands amateurs de théâtre et le pratiquant en amateurs, un prétexte pour inviter des amis qui ne vont pas au théâtre habituellement. Ils ont reçu dans leur appartement (salon de 20 m2) régulièrement pour un public ami, une fois tous les deux mois depuis 2017, des comédiens recrutés dans les salles parisiennes. C’est ainsi qu’ils ont connu Mathilde & Moïse. C’était satisfaisant, mais le covidisme a scindé le réseau entre covidistes prêts à imposer le masque chez eux & presque à exiger le passe, et anticovidistes résistants, d’où la nécessité ressentie de structurer un nouveau réseau durable, notamment autour des collectifs anticovidistes. Hélène & Philippe ont donc repris leur habitude antérieure, mais pour un public renouvelé, anticovidiste. Les gens ne viennent plus pour soutenir un artiste, mais parce qu’ils ont une opportunité d’assister à un spectacle sans passe. Cela rejoint l’avis de Moïse : « On ne se présente pas comme à soutenir ; on propose un spectacle ». Ils sont en rapport avec un lieu culturel officiel sur Paris qui propose des spectacles clandestins sans passe, ce qui suppose complicité, discrétion, dissimulation de la part des spectateurs qui doivent être avertis, car le même lieu est fréquenté en même temps par des spectateurs conformistes qui peuvent s’offusquer de voir une personne entrer sans passe ! Il faut donc s’arranger pour présenter un bout de papier qui ressemble de loin à un passe. La tarification dans ce lieu est fixe à 10 €.
La nécessité d’un réseau alternatif est alimentée par le ressenti de certains passionnés de théâtre, qui n’ont plus envie de fréquenter les salles, à cause de l’attitude de certains professionnels du spectacle. C’est parfois de l’ordre du dégoût, et je vous renvoie à cet article où j’ai expliqué mon propre ressenti par rapport à la Cinémathèque dont j’étais un fidèle spectateur, mais aussi la Comédie Française à laquelle je m’étais réabonné juste à la saison du covid ! (vidéo ci-dessus) On serait parfois tenté de se réjouir des déboires de certains artistes qui ont couru après le covidisme, à l’instar de l’actrice Lola Dewaere qui « témoigne des effets secondaires du vaccin » en mars 2022. Elle ne semble exprimer aucun regret relatif à ce « choix » de se faire injecter plutôt que de résister… Elle voudrait nous apitoyer, mais s’est-elle apitoyée sur les artistes qui ont renoncé à leur réputation & à leurs revenus pour conserver leur liberté d’expression et leur liberté de disposer de leur corps ? Je ne connais pas cette actrice, et ne la cite qu’à titre d’exemple ; ma question n’est pas purement rhétorique. À moyen terme, ces réseaux doivent veiller à notre santé mentale face à l’effondrement prévisible si la tyrannie sanitaire poursuit son agenda. C’est notre façon d’anticiper la « résilience » que la macronie veut nous vendre comme un autre vaxin ! Pour l’artiste, la perspective de monter un nouveau spectacle vaut parfois thérapie contre la dépression.
J’ai relevé dans Télérama une publicité intitulée « Comment YouTube est devenu le canal de l’exception culturelle française », avec la photo d’Éric Ruf, qui dans le contenu de cette publicité, se félicite de ce que « La Comédie-Française, privée de spectateurs par le Covid, a par exemple profité de cette période inédite pour développer sa présence en ligne ». Youpi, vive le Covid ! Ionesco se retourne dans sa tombe.
Bien avant le covidisme, en tant que grand amateur de chansons, j’en avais été dégoûté par la popcornisation des spectacles (voir Concert-clystère au Zénith). En ce qui me concerne, je ne pense pas bouder ad vitam æternam, mais j’y retournerai à reculons, et puis ayant fait connaissance personnellement ou découvert par Internet d’autres artistes de valeur, j’irai voir leurs spectacles en priorité, que ce soit en salle ou à domicile. À cela s’ajoute le fait que le covidisme nous propose gratuitement le plus grand film qui ait jamais existé, avec dans le rôle des méchants Bill Gates, Soros, Macron, Merkell, Biden, verantanplan, et dans le rôle des Zorros, Raoult, Fouché, Henrion-Caude, Violaine Guérin, Martine Wonner, André Bercoff, Idriss Aberkane, Décoder l’Éco, Francis Lalanne, Karine Dubernet, Ingrid Courrèges, etc. Pas un jour sans deux heures de vidéos & d’articles en tous genres. Pourquoi aller au cinéma voir des films qui vous proposent des superhéros dont les comédiens qui les incarnent se cachent sous leur sofa quand on leur montre un petit virus ? « Tu as vu le dernier Luc Besson ? » cède la place à « Tu as vu la dernière vidéo d’Asselineau ? » Amélie Paul prend la place d’Amélie Poulain ! La dernière pièce de théâtre que j’aie vu avant le covidisme, c’était Un ennemi du peuple d’Henrik Ibsen, au théâtre des Célestins à Lyon, et il m’insupporte de savoir que ces gens qui ont engueulé les spectateurs (la mise en scène de Jean-François Sivadier avait un côté happening) pour ne pas croire le Dr Stockman ont sans doute engueulé les mêmes spectateurs pour croire le Dr Raoult. Si le théâtre est juste un divertissement, alors je n’ai pas envie. J’ai la chance d’avoir un métier qui me plaît, et quand j’enseigne un texte ou un film, j’y crois. J’ai été dégoûté par des collègues qui enseignaient Rhinocéros d’Ionesco et qui se sont mis un masque Rhinocérique sur leur groin & ont puni les élèves qui ne le portaient pas assez haut sur le leur. Pour citer Anouilh, j’aimeras rappeler à ces braves comédiens qui ont signé des tribunes ou fait des publicités pour nous inciter à nous faire injecter qu’ils ont peut-être poussé la distanciation jusqu’au cynisme : « Quel sera-t-il, mon bonheur ? Quelle femme heureuse deviendra-t-elle, la petite Antigone ? Quelles pauvretés faudra-t-il qu’elle fasse elle aussi, jour par jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur ? Dites, à qui devra-t-elle mentir, à qui sourire, à qui se vendre ? Qui devra-t-elle laisser mourir en détournant le regard ? »
Le spectacle à domicile s’est donc développé soit dans la succession d’associations ou de réseaux préexistants qui se sont parfois scindés, soit par la création de nouvelles pratiques pour contourner les mesures covidistes. On peut noter la création du festival & du terme de « Chant’appart » : « Chant’Appart sert la chanson au plus près des spectateurs dans la région Pays de la Loire en organisant des spectacles de proximité dans des lieux atypiques… en bref dans des lieux où elle n’a pas l’habitude d’aller ! Il arrive même que « les accueillants » poussent les meubles du salon, fassent place à micros et projecteurs, bref transforment des lieux privés en salles de spectacle public, avec pour bouquet final un buffet rassemblant dans une belle convivialité artistes et spectateurs. » À Nantes, le site fairedestrucs propose des spectacles à domicile, théâtre ou musique, semble-t-il depuis le covidisme. Francis Lalanne évoque à la 41e minute de cette entrevue de mars 2022 sa participation à des « spectacles clandestins », et il propose des cours de théâtre dans un théâtre-restaurant parisien de 40 places qui donne bien envie de s’y précipiter, le Broadway café comédie.
Certains rares théâtres se sont singularisés par leur résistance. On évoque souvent le Théâtre du Nord-Ouest (Paris IXe), qui a vaillamment détourné la loi en proposant des « répétitions générales » plus ou moins ouvertes au public (les répétitions étaient autoriséés) pendant le confinement ou à l’époque des jauges, masques, couvre-feu et je ne sais quoi, sans avoir été dénoncé par la presse nationale-covidiste, ni avoir été fiché W sur Wikipédia, contrairement à Francis Lalanne, qui est durablement étiqueté « complotiste » sur ce site financé par Bill Gates & George Soros [2], ce qui peut être considéré comme un honneur. À quand pour Laurent et Georges (qui ont leur page Wikipédia) ? J’y avais été voir en 2021 Le Masque, une pièce de et avec Jean-Luc Jeener, le directeur de cette salle. Il était amusant d’observer dans le hall le ballet entre spectateurs masqués ou non masqués venus pour les deux spectacles proposés à quelques minutes d’intervalle.
Anne-Marie avait auparavant une pratique amateure régulière de performances dans un lieu parisien branché, mais avec le covidisme, il y a eu une fermeture, il n’y avait plus de confiance. Des amitiés se sont brisées, même avec des professionnels reconnus. Pour elle il est hors de question d’y retourner. Ils auraient dû protester contre les mesures covidistes, en se réunissant. À cette époque elle a eu connaissance des sessions de « Sport sur ordonnance » dispensées par le collectif Ami entends-tu, avec Marie-Line comme chanteuse, tous les dimanches place de la République à Paris. Pour elle, c’était un acte politique & artistique unique, et je suis plus que d’accord, puisque cela a changé ma vie aussi, et je n’écrirais pas cet article sans cette rencontre extraordinaire (déclinée dans une trentaine de villes en France par d’autres collectifs, qui ont tous fédéré les résistants). Cela relève du spectacle de rue, une autre activité qui existait avant le covidisme, mais qui s’est développée depuis. Pour ma part, d’ailleurs, ce contact avec des artistes m’a donné le courage et l’occasion de chanter (mal) dans le métro, puis de prendre la parole sur scène, enfin de créer (un peu par hasard et sans y penser) le personnage de Jean-Brichèle, qui se trouve connaître un certain succès dans les manifs. N’est-ce pas un peu aussi du « spectacle de demain » ?
<https://www.youtube.com/watch?v=rbr...>
Hélène a pu amener chez Anne-Marie pour un spectacle qu’elle a accueili à nouveau chez elle après une longue parenthèse, sa petite-fille de 3 ans (ce qui n’aurait pas été possible dans un spectacle en salle) pour un spectacle musical avec une voix lyrique (sans sono). La fillette a découvert le chant lyrique avec émerveillement, sans piper mot.
Le covidisme a aussi engendré des formes de théâtre nouvelles ou remises au goût du jour, comme différentes initiatives plus ou moins fumeuses de « théâtre au balcon » : soit des artistes jouent depuis leur balcon pour la rue : « Le théâtre s’invite au balcon des Parisiens », soit ce sont les spectateurs qui assistent depuis leur balcon à un spectacle, comme à Saint-Priest. Pour Moïse, il s’agit d’une manifestation covidiste qui s’ignore. Il en connaît un exemple émanant d’amis ne souhaitant pas renoncer à leur liberté d’artiste et n’étant pas contre une rémunération occulte, qui proposent une forme de spectacle innovante où avant tout les « distanciations » sont respectées. C’est un équivalent à peine plus humain des apéros en visio. Nous entrons dans l’ère du « sans-contact », à tout point de vue… En ce qui concerne le théâtre de rue, certaines municipalités ont poussé la perversion jusqu’à exiger des « passes sanitaires » pour y accéder, comme à Caen par exemple.
1.3. Particularités du spectacle en appartement.
Mathilde & Marie-Line ont le même ressenti de la particularité du théâtre en appartement ou du « Chant’appart » : le trac. Celui-ci est décuplé par la proximité avec les spectateurs (surtout si c’est une première expérience où forcément on invite ses amis). On est comme à poil, à deux mètres, sans lumières pour vous isoler, on voit les spectateurs car souvent l’appartement est éclairé, lesquels sont souvent des gens que l’on connaît, et qui ne vous connaissent parfois pas comme artiste, mais comme militant. On ne peut pas trembler, pas porter la voix, ce qui permet dans une salle de théâtre d’évacuer le trac. Malgré ce hic, le théâtre en appartement est une expérience attachante pour Mathilde, qui ne voudrait pour rien au monde retourner au théâtre en salle, pour les raisons évoquées ci-dessus. Hôtes, artistes & spectateurs s’accordent pour reconnaître l’importance de l’après spectacle, qui est souvent un moment convivial, apéritif ou repas soit préparé par les hôtes, soit à l’auberge espagnole. Je peux le confirmer sur mes deux premières expériences. La troisième était un peu différente, car le lieu alternatif était non pas un appartement, mais un lieu associatif, et il s’agissait d’un concert d’Ingrid Courrèges. Il y avait environ 130 personnes, et même si la rétribution était « au chapeau », il y avait une vérification des billets électroniques à l’entrée. Je ne connaissais personne parmi le public, et cela ressemblait à un spectacle normal, sauf le chapeau. Néanmoins l’ambiance « complotiste » assurait une ambiance, en plus de la qualité de la prestation. Certains hôtes de spectacle à domicile ont fait le choix de faire venir un artiste avec une rémunération fixe et un tarif, mais sans convier leurs amis. L’artiste est payé, et s’il manque une partie du cachet, les hôtes complètent.
Nous évoquons d’autres types d’organisation. Le théâtre d’immersion prend possession de tout l’appartement, un peu à la manière d’une performance. Les invités passent de pièce en pièce, où ils rencontrent différents comédiens. On peut aussi filmer cela et transmettre en vidéo à des spectateurs qui restent chez eux, mais alors est-on encore dans le spectacle vivant ? Vu l’adhésion de la plupart des librairies au covidisme, ne pourrait-on imaginer aussi organiser en appartements des lectures-dédicaces par des auteurs plutôt qu’en librairies ? Je plaide pour ma chapelle bien entendu, car j’ai constaté souvent davantage d’intérêt pour mes écrits dans les cercles résistants que dans les cercles mainstream où ce qui compte est moins le talent que le réseau.
2. Quels spectacles, quels spectateurs, quel statut ?
1. Le type de lieux : appartements, maisons, lieux associatifs…
Certains théâtres louent leurs salles. La tendance est de ne plus payer les artistes, alors qu’avant il y avait un minimum garanti. Dorénavant ce sont eux qui paient pour jouer ! Par exemple, une salle de 50 places au centre de Paris fait payer 500 € pour la location de la salle et le régisseur. Un appartement ne fait pas payer. Il existe en gros deux réseaux importants, les scènes subventionnées & les scènes privées, où on paie pour jouer, comme le festival d’Avignon. Les hôtes sont souvent des femmes en retraite. À Paris ce sont des appartements suffisamment vastes, voire de petites maisons, avec un salon de 20 à 50 m2.
2. Logistique : éclairage, son, décors. Nombre d’acteurs ? Types de spectacles.
La durée des spectacles est limitée à une heure, une heure et quart. En effet, les lieux & les sièges n’offrent pas toujours le confort d’un théâtre. On n’a pas parlé d’un aspect, les toilettes, qui sont forcément celles de l’hôte, ce qui pour une Tétralogie en bonne et due forme ou un Claudel, pourrait poser problème ! Le nombre de comédiens est limité à 1, 2 ou 3 maximum, parfois plus, mais on se heurte bien sûr au casse-tête de la rémunération. Les comédiens doivent apporter le matériel (costumes, décor, éclairage, sono). Ils se transforment en sherpas ! Moïse & Mathilde se sont organisés et parviennent à tout faire rentrer dans des sacs qu’ils amènent en transport en commun. Avant le spectacle, le sherpa se transforme en déménageur, car il faut déplacer meubles & chaises (d’ailleurs quand on reçoit 50 personnes, qui dispose de 50 sièges à domicile ?) et souvent les hôtesses âgées auraient du mal à le faire seules. D’où l’intérêt d’avoir joué Les Chaises d’Ionesco ! Il faut masquer vitres & miroirs pour éviter les reflets. Moïse a allégé les décors, mais il ne transige pas sur l’éclairage. Les projecteurs sont lourds, donc il a fini par se contenter d’un seul ou deux au maximum, et utilise des LED pour pouvoir se brancher sans faire disjoncter, ce qui est le risque si on veut faire comme au théâtre en multipliant les projecteurs. Dans les faits, la plupart des comédiens à domicile ont renoncé aux projecteurs.
En revanche malgré le trac, le fait de voir les spectateurs & qu’ils se voient entre eux n’est pas considéré par tous comme une gêne. On joue souvent avec le décor et le mobilier des lieux, si le sujet du spectacle s’y prête. Cela pose parfois un problème si une hôtesse tient particulièrement à imposer un élément de décor : il faut transiger pour lui faire plaisir. Anne-Marie témoigne qu’au contraire, cela a parfois fait revivre des objets qu’elle avait mis de côté. Après un remue-ménage théâtral, il arrive d’entendre : « Allez, je vais laisser l’appartement comme ça ». Certains confondent théâtre en appartement & conférence. Il faut veiller à ce que les hôtes n’interviennent pas pendant le spectacle. Pour les spectacles musicaux, le problème est différent. L’utilisation d’une sono interdit le plus souvent l’utilisation d’appartements privés ou même de locaux partagés dans des HLM. Nicolas fait part de son envie d’organiser des spectacles dans un tel local, mais a priori l’usage d’une sono, donc un spectacle musical semble être compromis par le règlement intérieur. Reste à tenter de négocier avec les voisins. Si l’on veut faire venir un pianiste, il vaut mieux posséder un piano, mais là je pense que les musiciens ont l’habitude des concerts privés entre amis ou amis d’amis, comme le savent les lecteurs de Proust !
3. Quels spectateurs ? Réseau amical ? Tout public ? À-côtés conviviaux. Avantages & inconvénients.
L’apéritif ou la collation ne doivent surtout pas commencer avant le spectacle, sinon on ne s’en sort pas (on n’en est pas encore avec les distributeurs de pop-corn comme dans les UGC ou au Zénith !) Pour Laurent, on vit une époque de « conflit asymétrique avec notre propre État ». Les réseaux sociaux doivent permettre au spectateur comme à l’hôte, de gagner en responsabilité, de ne plus être passif dans le spectacle comme dans l’information. À moyen terme, pour les artistes & les hôtes, se fédérer en réseaux permet aussi de diversifier l’offre & de fidéliser le public. C’est l’occasion d’apprendre ce qu’est un spectacle, voire un film. Il a lui-même réalisé le clip de la chanson de Marie-Line Weber « Nous on chante », qui grâce aux réseaux développés depuis un an, a réuni une centaine de figurants pendant tout un dimanche, ce qui nous a permis incidemment de voir comment on tourne un film. Les artistes peuvent compter sur leur réseau pour constituer un noyau. C’est le cas d’Ingrid Courrèges qui avait un réseau grâce à « The Voice », mais qui s’en est créé un autre avec le covidisme, les deux n’étant pas exclusifs l’un de l’autre. Personnellement j’ai découvert cet aspect pendant son spectacle (étant un farouche non-possesseur de télévision, je ne sais même pas ce qu’est « The Voice »).
Hélène & Philippe ont une pratique particulière et particulièrement généreuse, dont j’ai eu l’occasion de bénéficier à plusieurs reprises : ils offrent un repas plantureux sous forme de buffet après le spectacle, qu’Hélène a préparé elle-même. Pour Philippe, ce type de spectacle n’est un succès que si les trois parties sont réussies : le spectacle, le buffet & le partage. On peut parler en ce qui les concerne de mécénat. Je peux en témoigner, et cela est valable également pour le spectacle de Marie-Line Weber auquel j’ai assisté (où la formule était mixte : repas préparé par l’hôtesse ; plats & boissons apportés pas les spectateurs / convives). Lors de ces repas, des contacts sont pris, que ce soit les autres artistes souvent présents ou les spectateurs. Par exemple, une amie architecte avec qui j’étais venu a pris contact avec… un plombier ! Ainsi le réseau s’agrège, les amitiés se solidifient, la chaîne continue, certains oseront se lancer dans le rôle d’hôtes, d’autres dans celui d’acteurs à domicile
4. Aspects juridiques, financiers ; assurances.
Le régime de l’intermittence est sujet à débat. Certes il entraîne la dépendance par rapport à l’État, mais il offre une relative liberté. C’est une subvention déguisée qui permet une richesse & une diversité culturelle, avec ses travers comme le souligne Mathilde, qui n’a pas apprécié les vagues de spectacles « sur le Kosovo », j’ajouterai « sur les sans papiers », et bientôt, n’en doutons pas, « en soutien à nos frères & sœurs ukrainiens ». L’un des derniers spectacles que j’aie vus était d’ailleurs un excellent spectacle très novateur sur les sans papiers ! (Ce n’est pas parce qu’on choisit des sujets à la mode qu’on n’a pas de talent !) Faute d’institution de ce type, aux États-Unis, les prix des places de spectacles sont bien plus élevés qu’en France. Comme il se crée un maillage dans la région Île-de-France (et dans chaque région), il est imaginable que grâce à ce réseau informel, les artistes réalisent les 43 cachets officiels qui leur permettent de valider leur statut d’intermittents, et qu’ils puissent alors accepter des lieux plus modestes sans déclaration. Nous parlons donc du Guso (ex « Guichet unique du spectacle occasionnel »). Il fait l’interface entre hôtes et artistes. L’artiste « fait un Guso ». Les charges sont à peu près de la moitié du cachet. Pour 200 € de « chapeau », il y a 100 € pour l’artiste, 90 € de charges. L’hôte doit s’affilier au Guso pour pouvoir rémunérer les artistes ; cela le responsabilise. Chaque particulier ne peut organiser que 6 spectacles par an avec le Guso. Cela permet à l’artiste de cotiser pour l’assurance maladie, les congés spectacles, congés maternité. Pour Laurent, chacun, hôte, spectateur, doit être éduqué au Guso, ce qui n’exclut pas la rémunération au chapeau. Les deux sont complémentaires.
Certains hôtes peuvent faire le choix, exceptionnellement ou non, d’offrir le spectacle, sans chapeau. L’artiste, dans ce cas, vend son spectacle comme une prestation banale. En ce qui concerne le chapeau, l’expérience montre que plus les gens sont riches, moins ils sont généreux. C’est ce que j’avais personnellement remarqué lors des « enveloppes » destinées aux guides en voyage organisé. J’avais eu l’occasion de la recueillir une fois, et j’avais remarqué que des gens qui se vantaient d’être traders avaient mis 5 €, quand d’autres en mettaient 20 ou plus. De toute façon en général pour Laurent, le spectacle est ubérisé. Les prix des billets sont souvent établis en fonction du pourcentage de réduction sur Billetreduc. Selon Hélène, un tarif conseillé de 20 € en appartement, c’est un peu trop élevé, mieux vaut tabler sur 15 €. Après moult tâtonnements, elle a décidé de disposer le chapeau au début, parce que beaucoup de gens le demandent dès leur arrivée pour être tranquilles. Pour les artistes, il vaut mieux jouer vingt fois à 10 € qu’une fois à 200 €. Moïse fait part de son expérience en Eure-et-Loir où ils possèdent une maison. Le milieu social est beaucoup plus précarisé qu’en Île-de-France, et pour certains, 2 € est déjà une somme indépassable pour un spectacle. Ce qui est gratuit n’a pas de valeur, et mieux vaut payer 1 € que rien. J’avais fait la même constatation comme enseignant, quand on nous imposait presque de payer à 100 % pour les sorties sur les fonds de l’établissement, et j’avais fini par y renoncer alors qu’au début de ma carrière j’avais organisé beaucoup de sorties.
Une autre solution est utilisée par Mathilde & Moïse, persuadés qu’on peut quitter le régime de l’intermittence, qui peut selon eux devenir un système de dénonciation quand le spectacle est interdit. Ils ont opté pour le régime d’auto-entrepreneur, qui permet en outre de toucher les hôtes qui ne veulent pas entendre parler de l’intermittence. Ils sont opposés à ce système. « Toutes les putes se sont couchées pour garder leur année blanche » [3] Pour Laurent, dans le cadre de ce « conflit asymétrique », on ne peut pas tout changer pour les autres. Il évoque le cas d’artistes musiciens qui sont dans la détresse, et n’imaginent pas pouvoir tenir deux ans de plus. Pour lui, on ne fait pas d’idéologie quand on est dans la résistance, on est pragmatique. Il se trouve que depuis cette soirée j’ai recueilli le témoignage d’un autre artiste qui n’est pas entré dans le spectacle chez l’habitant, mais qui est un peu dans cet état de détresse. Les cachets n’ont pas augmenté depuis 20 ans. Musicien de bon niveau, il donnait des cours de musique payés au noir, qui complétaient le régime de l’intermittence. Depuis le covidisme, cela a quasiment disparu, parce que dans son entourage, les gens n’ont plus d’argent pour payer des cours. La fameuse « France d’en bas » ignorée par la Macronie. Il fait un cachet en Ehpad payé 200 €, cent pour lui, cent de charges, et il se prend une contravention de 135 €… Pour contourner la dénonciation & la loi, on peut ruser, par exemple présenter le Guso comme une représentation privée pour un anniversaire, un repas de 4 amis qui engagent un musicien. Cela me fait penser aux pièces classiques où l’on engage un troubadour pour jouer sous le balcon d’une belle : et pourquoi ne pas remettre cela au goût du jour ! Le Guso est déclaré, mais reste discret compte tenu de l’état de l’administration, qui ne va pas se mettre à éplucher les fichiers pour accuser les tricheurs. J’ajouterai qu’il suffit de compter sur la nouvelle définition de l’« altruisme », dont les deux mamelles sont en fait égoïsme & délation !
Question assurance, Moïse & Mathilde en tant qu’auto-entrepreneurs ont souscrit une responsabilité civile professionnelle à 10 € par mois. Elle complète utilement l’assurance des hôtes, car le sport favori des assureurs est de se défausser les uns sur les autres ; le mieux est donc que chacun soit assuré.
3. Perspectives d’avenir.
Si pour certains il n’est pas envisageable de renouer avec le théâtre en salles pour des raisons évoquées ci-dessus, pour Grégory, il ne faut pas mélanger art & politique, et il faut penser plus loin, donner une place à tous les arts de la scène (danse, etc), il faut faire venir les enfants car l’art est porteur de nos valeurs essentielles. Lui-même est actuellement en train de travailler à un événement planétaire autour d’œuvres méconnues du sculpteur Auguste Rodin sur le thème des Lumières. Pour Laurent, il existe des restrictions artistiques & sociales. Côté artistique, il serait dommage de se priver de productions plus audacieuses. Avec Georges, ils ont créé une opérette pour dix artistes dont quatre musiciens. C’est dans la perspective d’adapter ce spectacle à des lieux alternatifs qu’il a fait l’acquisition d’une mini-régie. Le théâtre en appartement ne peut convenir non plus par exemple au chanteur HK et sa fanfare, qui ont besoin d’au moins 500 personnes. Pour ces spectacles à forte logistique, cela impose aussi un délai minimal d’un mois à un an pour permettre l’organisation d’une tournée. Le concert d’Ingrid Courrèges auquel j’ai assisté avait été organisé en un temps record, mais c’est parce qu’un lieu prévu dans un premier temps en banlieue s’était dédit, et qu’un lieu de secours sur Paris s’était proposé.
La chanteuse se déplace en voiture avec son compagnon qui assure avec elle toute la logistique, ce qui facilite la réactivité, mais ce ne peut pas être le cas général. Côté social, il faut rester modeste et en marge. Les petites configurations ne peuvent pas être récupérées. Il n’existe pas de lieu parfait, sinon la maréchaussée débarquerait dans les 5 minutes. J’en ai eu l’expérience lors du concert d’Ingrid Courrèges, où les organisateurs ont dû intervenir à plusieurs reprises pour demander aux gens de retirer leurs messages sur Twitter ou autres, et de ne pas prendre de photos où la salle soit reconnaissable. Il y a une autodiscipline à acquérir, et cela nécessite une éthique de responsabilité & des réflexes qui se conjuguent mal avec le « tout public ». Certains jeunes familiers des rave parties ou des apéros ou autres flashmobs sont quand même rodés sur cette discipline !
On sait dorénavant que les gouvernements mondialistes – comme le Canada de Trudeau et la France de Macron en ont donné l’exemple – n’hésiteront pas à bloquer les comptes en banques ou à priver des gens d’emploi & de revenus, sans que la « gôche » appelle à descendre dans la rue. Ce qui est dommage car si elle appelait pour une fois à descendre dans la rue pour de vraies raisons, cela entraînerait forcément des violences policières qui lui donneraient alors l’occasion de descendre dans la rue pour ses raisons factices & favorites ! Certains artistes ont créé un parti politique pour contourner la loi, prenant au mot nombre d’artistes qui se sont contentés de rebaptiser leur tournée « meeting politique » en déclarant se présenter aux élections (Eddy de Pretto, Julien Doré, Grand Corps Malade, etc.). On peut se demander pourquoi ces stars se sont manifestées par leur silence quand il se serait agi de s’unir pour défendre ceux qui ne sont pas des stars, comme l’a brillamment exprimé Thomas Séraphine.
Le réseau résistant finit par créer un public, c’est ce qui s’est passé avec Ingrid Courrèges & sa tournée triomphale chez l’habitant. Son concert auquel j’ai assisté était étiqueté « meeting politique », et de fait il a bien été précédé de deux ou trois harangues militantes pour justifier l’appellation. Reste aux spectateurs de jouer le jeu, de ne pas faire circuler de photos, etc. Il peut s’avérer dangereux de créer des structures pérennes. On peut retourner le slogan favori de Big Pharma, Big Tech & Big Bank « Too big to fail » en « Too small to fail » ! Il s’agit de « permaculture politique ». Il vaut mieux éviter de créer des sites Internet & rester discret, mais créer un réseau informel qui, une fois constitué, fournit une base d’actions. Georges évoque la stratégie de l’Église des catacombes des chrétiens russes sous la dictature communiste : se cacher, y compris sous terre, pour résister discrètement. Laurent évoque la Fédération d’Associations de Théâtre Populaire, qui organise sur tout le territoire des tournées pour des troupes, avec une logistique minimaliste (hébergement chez l’habitant, repas commun, marges réduites). Il ne faut pas limiter notre réflexion à Paris & aux appartements, comme le prouve la tournée d’Ingrid Courrèges ou les autres initiatives mentionnées plus haut. ll vaut mieux pour le moment selon lui garder une certaine discrétion sur le mode opérationnel de ce que nous envisageons de faire. Lors de la Commune de Paris, des communards avaient fabriqué de merveilleuses barricades (pas des tas de bois & de pierres), ils en étaient tellement fiers que les plans furent diffusés dans un journal parisien, permettant à l’ennemi de les déjouer ! [4]
J’ai des amis passionnés de chanson qui viennent de prendre leur retraite dans la Nièvre, et qui envisagent d’aménager une grange en lieu de spectacle. Les artistes pourraient être amenés à devenir saisonniers selon Laurent (d’avril à octobre). Pour Mathilde, c’est le contraire : elle joue davantage en hiver, quand les Parisiens ne sont pas en vacances & ont envie de spectacles. C’est que Laurent songe aussi à investir les jardins pour des productions plus ambitieuses en terme de nombre d’artistes, ce qui va de pair avec la saisonnalité. On songe aussi à la location de péniches, aux kiosques des parcs parisiens que l’on pourrait même investir pendant une demi-heure de façon clandestine.
En conclusion, nous assistons sur cette question du « Spectacle de demain » à un fourmillement d’idées qui vont dans la même direction. Ces deux ans de covidisme qui ne sont peut-être pas terminés auront été l’occasion de nous mobiliser pour construire non pas « leur » mais notre « résilience », « leur » mais notre « monde d’après », le « Nôtre monde » de Réinfocovid. C’est une sorte d’« empowerment » (autonomisation en bon français).
En chemin, n’aurons-nous pas fait exploser bien des baudruches de ce monde d’avant ? Artistes bidons faits du même carton-pâte que les décors dans lesquels ils évoluent ; un carton-pâte qui caractérise aussi tout ce en quoi nous avions cru croire : médias, partis politiques « de gôche », médecins & philosophes de plateau-télé, journalistes gouvernementaux, animateurs de talk-show faussement humanistes [5], fact-shakers (agitateurs de faits) autoproclamés, etc. ? Georges a rappelé la récente interdiction d’exercer des artistes russes de premier plan mondial, le chef d’orchestre Valery Gergiev ou la soprano Anna Netrebko, qui sont les Djokovic de la musique classique. Quant aux autres, nous leur dédions ces vers de Victor Hugo :
« J’ai dit à la narine : Eh mais ! tu n’es qu’un nez !
J’ai dit au long fruit d’or : Mais tu n’es qu’une poire !
J’ai dit à Vaugelas : Tu n’es qu’une mâchoire ! »
Nous abattrons les fausses gloires de la fausse élite, sans oublier qu’il en existe de vraies. Ne confondons pas le bon grain et l’ivraie.
– Article repris par Profession gendarme.
© altersexualite.com 2022
[1] Nous parlons du théâtre populaire actuel, mais il est bien évident que si nous remontons les siècles, le théâtre à domicile a une histoire riche et variée évoquée par d’innombrables œuvres, de Hamlet à La Règle du jeu de Jean Renoir, et les amateurs de théâtre ont toujours monté des pièces à domicile pour leur famille ou leurs amis. Il s’agit ici d’évoquer de nouvelles voies pour vivre du théâtre en dehors des circuits institutionnels.
[3] Pour en savoir plus sur ce dispositif inventé par Macron au titre du « koikilenkout », lire « Intermittents du spectacle : "L’usine à gaz de l’année blanche est remplacée par une autre usine à gaz" » sur France-Culture.
[4] Cette allusion de Laurent me rappelle une citation d’Auguste Blanqui : « Des milliers de jeunes gens instruits, ouvriers et bourgeois, frémissent sous un joug abhorré. Pour le briser, songent-ils à prendre l’épée ? Non ! La plume, toujours la plume, rien que la plume. Pourquoi donc pas l’une et l’autre, comme l’exige le devoir d’un républicain ? En temps de tyrannie, écrire est bien, combattre est mieux, quand la plume esclave demeure impuissante. Eh ! bien, point ! On fait un journal, on va en prison, et nul ne songe à ouvrir un livre de manœuvres, pour y apprendre en vingt-quatre heures le métier qui fait toute la force de nos oppresseurs, et qui nous mettrait dans la main notre revanche et leur châtiment. »
[5] Voir mon article « Tafdur, l’esclavagiste de l’audiovisuel public ».