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Les cracks craquent ! pour les 5e / 4e.

Athènes autrefois puissante, de Marie-Sophie Vermot

École des loisirs, Médium, 2004, 166 p., 9,5 €.

dimanche 22 avril 2007

Une jeune fille essaie de se reconstruire suite à un drame de l’hétérosexualité (ce douloureux problème !) vécu par ses parents. Ce qui l’a fait tomber de haut, c’est le contraste entre la réalité et les histoires que l’on raconte aux enfants, ces mensonges d’amour et de pluie d’or, inscrits jusque dans ce prénom qu’on lui a donné du temps où tout allait bien.

Résumé

Le titre étrange, Athènes autrefois puissante, fait allusion aux paroles de la mère de l’héroïne, Danaé (Sur la 4e de couverture, l’éditeur a écrit Danaë !), du temps où la vie de couple allait au mieux. Cette prof d’histoire, caricature de ces « adultes [qui] ne pensent qu’à faire des cracks de leurs enfants » (p. 60), la motivait en répétant : « Les Athéniens avaient su mener leur ville à son apogée grâce à leur esprit d’initiative et d’anticipation » (p. 61). Le prénom qu’elle avait choisi pour sa fille évoque cette légende grecque d’une jeune fille fécondée par Zeus sous forme de pluie d’or. Comment s’étonner alors que lorsque le mythe familial s’écroule et que le père fréquente une autre femme, la mère tombe en dépression, et la fille dans une folie destructrice ? Ce roman est l’histoire de la reconstruction de Danaé, entre le moment où elle entre dans un lycée spécialisé tout en logeant chez ses grands parents, et celui où, après une autre crise, elle surmonte la haine qu’elle éprouve pour son père et retourne chez lui. Entre-temps, deux personnes l’auront aidée à reprendre pied, Florence, une calligraphe dont elle admire le travail et dont elle tombe amoureuse, et son psychiatre, qui, après avoir reconnu l’esprit d’initiative de Danaé, trouvera sans y penser l’antidote à la formule maternelle : « Ne pas anticiper. C’est la clé » (p. 162). Le récit est entrecoupé d’analepses, grâce auxquelles Danaé, plutôt que d’anticiper, revient sur les événements écoulés depuis le jour fatal où elle a appris la brusque séparation de ses parents.

Mon avis

Marie-Sophie Vermot a repris 6 ans plus tard la trame de Comme le font les garçons, qui d’ailleurs ne figure plus dans la liste de ses ouvrages chez le même éditeur, ce qui est dommage. En effet, la lecture comparée des deux romans serait un excellent exercice pour une classe de 4e. On retrouve l’idée d’une adolescente essayant de se reconstruire suite à un drame de l’hétérosexualité (ce douloureux problème !). Ici, ce n’est pas la mère prostituée, mais le père infidèle. Dans les deux cas, ce qui détruit la jeune fille, c’est le contraste entre la réalité et les histoires que l’on raconte aux enfants, ces mensonges d’amour et de pluie d’or, inscrits jusque dans le prénom qu’on leur donne. Ce roman est écrit à la troisième personne, ce qui me semble plus judicieux que le carnet intime de Malka dans l’ouvrage précédent. On retrouve la construction en dents de scie, analepses en contrepoint au récit principal, qui mime la reconstruction progressive de l’héroïne. Le style est sobre, l’auteur fait confiance au lecteur pour accompagner l’héroïne sur la voie de la guérison. Cela fournira la matière d’un travail pédagogique qui s’impose : ordonner le cheminement psychologique du personnage. La place de l’homosexualité est incidente, mais révélatrice, comme dans Comme le font les garçons. C’est dans une autre forme d’amour que Danaé cherche à compenser la faillite du couple de ses parents. Florence la remettra fermement en place. Évidemment, on pourrait se dire que ce récit risque d’étayer la thèse selon laquelle l’homosexualité est une réponse à une défaillance du modèle parental. Raison de plus pour comparer les deux versions, ce qui est possible pour des ouvrages courts. Dans le précédent roman, c’était le garçon dont Malka tombait amoureuse qui était gai, ce qui disqualifie ce genre de thèse. Je voudrais signaler pour terminer, une phrase qui me semble maladroite. Quand Florence refuse sa déclaration, Danaé se dit : « Peut-être avait-elle peur ? Parce que Danaé était mineure. Les relations sexuelles avec les mineurs sont interdites par la loi, et passibles d’amendes » (p. 119). Il s’agit de discours indirect libre, bien sûr, mais nos élèves croiront que le narrateur cautionne cette erreur. Alors rectifions : les mineurs de plus de quinze ans ont leur majorité sexuelle, et peuvent faire l’amour avec qui bon leur semble, sauf les « personnes ayant autorité sur eux ». Donc ce n’est pas cette considération qui a retenu Florence ! On comparera cette phrase avec celles déjà lues et commentées dans L’amour en chaussettes, de Gudule, et dans Sweet Homme, de Didier Jean et Zad. Bref, mes chers collègues, Marie-Sophie Vermot nous fournit là d’excellentes bases de travail !

 Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».

Label Isidor HomoEdu

 Lire aussi Mais il part…, de la même auteure.

Lionel Labosse


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