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Fille ou garçon, qu’est-ce que ça change ? pour les 4e

Houari pote beur et le voile de Yasmina, d’Arthur Falaïeff

Hachette jeunesse, 2005, 189 p., 10 €.

mardi 1er mai 2007

Les mésaventures de Houari, souffre-douleur de Kévin, son faux-frère d’adoption qui le traite de « pote beur » pour se moquer de lui. Sa découverte des autres, de Yasmina, de la question de la revendication identitaire, avec son regard naïf et déterminé. Un excellent ouvrage pour permettre aux élèves d’échanger de façon constructive sur la question arabo-musulmane.

Résumé

Houari, 13 ans, raconte son existence particulière. Orphelin à la naissance, il a été adopté par un couple de Français très moyens, les Mercier, et leur fils Kévin. Houari décide d’apprendre l’arabe, pour qu’il reste quelque chose de son père, mais Francis, le père adoptif, découvre le Coran et le dictionnaire bilingue, et jette tout ça à la poubelle (p. 29). Yasmina, la copine de classe dont Houari est plus ou moins amoureux, décide de porter le hidjab, et se fait exclure du collège. Djibril, responsable de l’école coranique, vient recruter Houari à domicile, parce que Francis a détourné les lettres qui lui étaient destinées. C’est que grand-père Boudiaf, le seul lien de Houari avec ses parents biologique, est un imam réputé en Algérie, et doit venir en France. Soutenu par « la Dasse », Houari suit donc ces cours d’éducation religieuse, en compagnie d’un étrange condisciple, qu’il identifie bien vite comme Yasmina. Elle a rasé ses beaux cheveux pour être admise aux cours de Mohammed Ben Youssef. Celui-ci n’est autre que Marcel Breton (p. 117), un converti tendance intégriste que les Algériens finissent par démasquer après un épisode rocambolesque de séquestration. Soutenus par la communauté, Houari et ses potes organisent une manifestation pour obtenir l’enseignement de l’arabe au collège, moyennant quoi Yasmina accepterait de revenir tête nue.

Mon avis

Un roman efficace, très agréable à lire avec ses 26 chapitres qui suivent l’alphabet français, d’Adoption à Zone. Si on laisse de côté quelques détails invraisemblables comme la caricature de la famille adoptive (plaidoyer involontaire pour l’adoption par des homos !), ou la méconnaissance de la procédure normale et des obstacles pour mettre en place des cours d’arabe dans un établissement scolaire, Houari pote beur et le voile de Yasmina est un roman attachant qui permet une découverte de la culture arabo-musulmane, et une réflexion sur l’islam des banlieues à mille lieues des caricatures médiatiques et des amalgames entre musulmans, islamistes et terroristes. Le personnage de Houari est particulièrement intéressant, car il est à l’opposé de la figure de l’arabe de banlieue médiatisé : très discret et respectueux, mais tenace et efficace dans ses revendications. Certaines répliques amuseront. Par exemple, quand Houari choisit une djellaba : « Mais tout à coup j’en vois une plus claire et je dis : — Celle-là, s’il vous plaît. — Non, Houari, tu vois bien, je viens de t’expliquer, c’est pour une fille. — Oui, mais je la trouve plus gaie » (p. 90). « Je voudrais l’embrasser, juste sur la joue, mais je ne peux quand même pas embrasser un garçon ! En plus, un garçon musulman… » (p. 103). Étonnament, l’auteur insiste sur ce sujet : p. 106, Houari a peur d’être vu alors que Yasmina habillée en garçon lui tient la main ; puis p. 107, ce geste étonne le grand-père, pourtant venu d’Algérie (alors que justement dans la plupart des pays musulmans, si l’homosexualité est interdite, du moins il est habituel de se tenir la main et de s’embrasser entre garçons). Voir sur ce sujet mon article sur une intervention du MAG, et Mehdi met du rouge à lèvres, de David Dumortier. La morale est optimiste. L’auteur a voulu pointer les erreurs de compréhension plutôt que le racisme, et la bêtise et l’ouverture d’esprit sont équitablement répartis entre les communautés. Par exemple, le principal et la police prennent une publicité commerciale rédigée en arabe pour un tract intégriste (p. 161). En conclusion, un excellent ouvrage pour faire échanger les élèves de façon constructive sur la question arabo-musulmane et sur le statut des filles dans l’islam.

 Le thème du foulard est également abordé dans Karim & Julien de votre serviteur et dans Un foulard pour Djelila, d’Amélie Sarn.

 En 2011, le sociologue Raphaël Liogier lance l’idée d’une Muslim pride. Un bon complément à cette lecture !

Lionel Labosse


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Messages

  • Bonjour, je suis bibliothécaire jeunesse, et je viens de finir ce roman... très polèmique...
    J’ai beaucoup hésité à en faire un coup de coeur, car les propos de l’intégriste Mohamed (le prof de coran) sont très durs vis à vis des femmes.. (je suis encore choquée !) Mais l’innocence et la bonne volonté de Houari fait contre poids à la bêtise des adultes et on adhère facilement à la cause de ces enfants et petits-enfants d’immigrés qui veulent renouer légitimement avec leur culture.

    Une belle histoire !