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Sida, préjugés et discriminations, pour les 5e / 4e.
L’Avenir perdu, d’Annie Goetzinger, Jonsson et Knigge.
Les humanoïdes associés, 1992, 61 p., épuisé.
lundi 30 avril 2007
La vie, l’amour, la maladie et la mort de Tim nous sont racontés en 60 pages, stations d’un chemin de croix classique, éprouvantes pour tous ceux qui ont connu les ravages du sida dans les premières années de l’épidémie, et les luttes pour faire reconnaître la dignité des malades. Un album à rééditer d’urgence !
Résumé
Depuis le premier baiser en colonie de vacances, Tim sait qu’il est différent. C’était en 1978. Quelques années plus tard, il couche « pour la première fois avec un homme, et depuis avec beaucoup d’autres » (p. 5), avant de rencontrer Peter, avec qui il emménage. Il doit faire face aux préjugés de ses parents, notamment de son père, qui le met en garde contre « la peste des pédés ». Tim a les mots pour se défendre : « Si les homosexuels multiplient les aventures, c’est à cause des voisins, des collègues, des parents qui nous méprisent » (p. 12). Il utilise même le mot « pédé ». Cela le pousse à faire un test VIH, qui se révèle positif. Après avoir bien réagi, son ami Peter semble être effrayé par la maladie et ses conséquences sociales. Il part travailler aux États-Unis, pour trois mois d’abord, mais il repousse son retour de loin en loin, incapable d’affronter la maladie de Tim. Lui-même refuse de faire le test. Après des mois de solitude forcée, Tim sort en boîte, et rencontre Ulli, qui devient son nouvel ami. Ulli lui fait faire la connaissance d’une association de séropositifs, dirigée par Lisa, ancienne toxicomane et prostituée, séropositive. Ils montent une pièce de théâtre militante… À quoi bon raconter la fin ? À cette époque, le pire était le pain quotidien de la plupart des séropositifs, et cet album n’enjolive pas la réalité…
Mon avis
La vie, l’amour, la maladie et la mort de Tim nous sont racontés en 60 pages, stations d’un chemin de croix classique, éprouvantes pour tous ceux qui ont connu les ravages du sida dans les premières années de l’épidémie, et les luttes pour faire reconnaître la dignité des malades. Je parle de l’Europe bien sûr, et la situation est toujours aussi grave ailleurs dans le monde, avec ou sans homophobie surajoutée. À noter que l’action se passe en Allemagne, et que certaines vignettes en portent des signes linguistiques. Rien n’est occulté dans ce « roman B.D. », qui témoigne de cette tragédie pour les générations actuelles, avec une véhémence de ton conforme à sa date de publication. L’homophobie et les préjugés sont présents à plusieurs reprises, que ce soit dans un hôtel, dans un bus, en famille ou au bord d’une tombe, par un ministre du culte. La sexualité gaie y est décrite sans faux-semblants ni provocation, l’évolution de la maladie aussi, même si la simplicité du dessin atténue le réalisme du propos. La citation du Petit Prince de Saint-Exupéry m’a particulièrement ému, pour avoir entendu ce même extrait en 1992 lors de la crémation d’un ami. Depuis, je n’ai jamais pu proposer ce livre à mes élèves, de peur de me mettre à chialer. Bref, de même qu’il faut continuer à lire des documents sur l’apartheid, il faut continuer à proposer de tels ouvrages aux plus jeunes, et l’on souhaite que cet album soit réédité au plus vite.
– Cet ouvrage bénéficie du label « Isidor ».
– D’autres livres dont l’action se passe en Allemagne : J’apprends l’allemand, de Denis Lachaud, et Un cœur grand comme ça, de Cordula Tollmien.
– Annie Goetzinger a collaboré au recueil collectif En mâles de nus, de Virginie Greiner (Attakus éditions, 2006).
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