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La Ménopause des Fées tomes 2 et 3

Crimes et Chatouillements, et La nuit des porcs vivants, de Gudule

Éditions Bragelonne, 2006 et 2007, 184 p. et 202 p., 13 € chaque volume.

jeudi 26 avril 2007, par Lionel Labosse

Gudule se lâche ! Dans ces tomes 2 et 3 (en attendant la suite) tout aussi déjantés et sexuellement incorrects que le tome 1, nous retrouvons les pochades potaches de Gudule, qui se lâche entre deux romans pour adolescents, et nous glisse entre les pognes un opuscule foutrement altersexuel !

Crimes et Chatouillements

Il y a d’abord Merlin, l’enchanteur vieillissant, les deux fées survivantes, le Père Cheval qui délaisse son amant Max pour s’adonner à la bigamie hétéro avec Linda et Aurore, ayant engendré Lulu (que Merlin prend pour « l’Élu ») avec l’une, et père putatif du maléfique Athanor avec l’autre, fils en réalité du terrible flic nain Damned. Tout ce beau monde se clochardise dans le métro « Brocéliande », sous les caméras d’une nouvelle émission de télé-réalité, et s’étripe en chœur pour la garde de Lulu, car « un enfant est le rêve de tout pédé qui se respecte ».

Crimes et Chatouillements nous entraîne dans le monde merveilleux du métro Marx Dormoy. En effet, Gudule, qui a quitté ce quartier (le XVIIIe arrondissement de Paris) pour de plus verts horizons, nous invente une station « Brocéliande » qui, en lieu et place de l’omniprésente publicité, serait décorée d’une fresque bucolique. Par contre, quand elle déplore que la RATP ait remplacé les bancs de jadis par des sièges individuels en plastique (p. 37), Gudule ignore que la modernité est allée encore plus loin lors de la dernière rénovation (sic), en supprimant carrément tout siège, sous prétexte de la présence d’individus du genre de Merlin et compagnie, pour les remplacer par la simple station debout ou, mieux, par l’appui ischiatique (re-sic !), en attendant carrément le piquet godemiché (oh ! pardon ! le style « for adults only » de Gudule est contagieux !), qui obstruera encore moins la partie basse des panneaux publicitaires, comme à la station Pigalle sur la ligne 2.

Gudule fait passer la Gay-Pride dans le XVIIIe ; avec une inénarrable bataille rangée (véritable gayrilla !) entre lesbiennes, gays, islamistes et ultra-extrémistes. À lire dans le métro, à voix haute pour couvrir les conversations des (insu)portables !

 Lire mon billet d’humeur sur la Gare du Nord.

La nuit des porcs vivants

J’ai oublié pour le tome précédent de signaler la superbe illustration de Jean Solé, qui, se prenant pour le Père Cheval, immortalise pour chaque tome les héros guduliens. Commençons par citer la dédicace mystérieusement adressée « À Barbara, rousse amazone, et à sa source radieuse ». Y aurait-il moule sous roche ? Passons à l’Œuvre en soi. Las des tribulations parisiennes, nos héros fatigués retournent à la source, en l’occurrence une cité de promoteurs en pleine forêt de Brocéliande, pompeusement baptisée « Le songe d’une nuit d’été ». Au lieu du paradis promis, ils trouvent une cité fantôme gardée par un ancien milicien franquiste, Jésus Mirador, le seul habitant à avoir résisté à toute une série de phénomènes paranormaux. À l’usage, il s’avère que ces phénomènes sont l’œuvre de tous les être légendaires de Brocéliande, que les promoteurs avaient privés de leur forêt. Enchanté, Merlin retrouve Puck, le faune farceur, Tangerine, la fée péteuse au contre-ut dévastateur pour le verre, Nicolas Flamel l’alchimiste, Obéron le roi qui passe à bon compte pour pédophile parce qu’il aime les enfants, Titania la reine, et Cachou le Centaure qui permet à Gudule de s’étaler complaisamment sur la zoophilie (mais sait-elle que c’est interdit par la loi ? Vite, que l’on censure ce livre ! Ah mais non, à l’instar des Animaux dénaturés de Vercors, Gudule nous a créé un dilemme, puisque Cachou est mi-homme, mi-bête !) Sans oublier les sept nains qui n’ont pas de sexe. En s’enfonçant dans la fresque merveilleuse qui constitue le jardin des époux royaux, le Père Cheval rencontre Leonardo, l’auteur de Mona-Lisa et de sa sœur mauvaise, pardonnez du peu : « l’aspic-Anna-Lise des contes de fées » (p. 99).

Bon, je ne vais pas tout vous raconter, sinon vous n’allez plus avoir hâte de savoir comment la pauvre Lulu va échapper aux griffes de son frère maudit Athanor, ni comment les héros vont échapper à la vigilance paranoïaque de Jésus Mirador, ni à la rapacité de « l’Énnemi : le Lucre ». Disons seulement que Gudule poursuit, sinon sa psychanalyse, du moins sa thérapie d’auteure bridée par le public enfantin auquel elle s’adresse. Et de nous inventer un bambin qui s’exclame à propos de sa maman : « vivement qu’elle crève » (p. 156) ; d’enfourcher son centaure de bataille (qui est aussi le nôtre) de la dénonciation des fausses accusations de pédophilie et de leurs ravages, de s’aventurer dans les sentiments à l’eau de pas rose : « Y a pas plus facho qu’un paria » (p. 43), etc.

Ce qu’il y a de plus pervers chez Gudule, ce n’est pas l’apologie de la sodomie, de la pédérastie, de la zoophilie à laquelle elle se livre à chaque page, non, c’est sa monomanie de l’orthographe. Pas la queue d’une coquille à se mettre sous la dent, ou alors il faut vraiment être soi-même un monomaniaque de la relecture. Par exemple, qu’est-ce qui justifie ce « s’alternèrent les saisons » de la p. 90, et encore ce sic de la page 174 qui n’est pas en italique, et encore… non, rien d’autre, macache ! Ah ! si, tiens, Gudule m’a entendu, et a utilisé l’adjectif technocratique que j’avais cité dans la critique du tome 2 : « Aurore se laissa tomber tout d’une masse, bleum ! sur les sièges ischiatiques » (p. 13). Cela est sans doute une torture impossible à imaginer pour une âme aussi crédule en la bonté humaine : le siège n’est pas « ischiatique », hélas : ce que la RATP a inventé est bien pire, il s’agit d’« appuis ischiatiques », sur lesquels il serait impossible de se « laisser tomber », car ils sont à hauteur des fesses d’un adulte debout !

Évoquons enfin la porte magique qui permet au Père Cheval de passer d’un monde à l’autre. Ce motif traditionnel du roman merveilleux n’est-il pas une belle métaphore de la double personnalité de Gudule, gentille auteure pour les enfants d’un côté, odieuse apologiste des perversités les plus [censuré] de l’autre ! Eh bien si ces livres sont chroniqués dans cette rubrique, aucun passage, si ce n’est secret, n’existe depuis la rubrique livres pour enfants. Imaginez qu’ils se transforment en porcs vivants en lisant ces lignes ! Je vous conseille également un roman paru en même temps, Diadème rose, de Cy Jung, qui présente le même goût pervers pour l’imparfait du subjonctif. Serait-ce elle qui se cacherait derrière cette Barbara ?

 Lire l’entrevue de Gudule et ses autres romans : Le bouc émissaire (L’Instit), Aimer par cœur (L’Instit), L’envers du décor, Étrangère au paradis, L’amour en chaussettes, La vie à reculons, Le chant des Lunes, Le bal des ombres, et la série des Rose : La vie en Rose et La Rose et l’Olivier. Gudule a également écrit la préface de mon roman Karim & Julien paru en mars 2007. Dans la veine gaudriolesque, on lira Paradis Perdu, publié en 2010.

Comme vous le feriez d’un mignon (trois syllabes)
Cliquez sur la photo afin qu’elle grandisse…

Lionel Labosse


Voir en ligne : Éditions Bragelonne


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